Les attaques ont visé l\'ambassade de France au Burkina Faso, l\'Institut français et l\'état-major des forces armées à Ouagadougou, le 2 mars 2018.
Les attaques ont visé l’ambassade de France au Burkina Faso, l’Institut français et l’état-major des forces armées à Ouagadougou, le 2 mars 2018. (AFP)

Attaque de Ouagadougou: « Ce sont des représailles » des groupes jihadistes à l’opération française « Sabre »

Les attaques de Ouagadougou, au Burkina Faso, « sont des représailles » a analysé vendredi 2 mars sur franceinfo Antoine Glaser, journaliste et écrivain spécialiste de l’Afrique. Au moins 28 personnes ont été tuées dans une attaque armée menée dans le centre de la capitale burkinabé. Pour Antoine Glaser, c’est une riposte des groupes jihadistes à la discrète opération « Sabre » qui consiste, pour les forces spéciales françaises, à traquer les jihadistes dans le Sahel.Les assaillants ont notamment visé l’ambassade de France, l’Institut français et l’état-major des forces armées. « C’est difficile de ne pas lier cette attaque très ciblée à l’opération française à la frontière algérienne, contre des groupes armés jihadistes », a expliqué le journaliste spécialiste de l’Afrique.

franceinfo : Les autorités françaises semblent ne laisser aucun doute quant au caractère terroriste de cette attaque. Partagez-vous ce sentiment ?

Antoine Glaser : C’est toujours difficile avant qu’il y ait des revendications, mais c’est la première fois qu’une ambassade de France est vraiment visée. En janvier 2016 et en août 2017, c’était des expatriés qui étaient visés dans des restaurants et des cafés. C’est difficile de ne pas lier cette attaque très ciblée à l’opération française qui a eu lieu dans la nuit du 13 au 14 février à la frontière algérienne, contre des groupes armés jihadistes et de Iyad Ag Ghali qui a fédéré un peu les groupes armés de cette région. On a l’impression que ce sont des représailles de ces groupes au moment où Emmanuel Macron est en train de faire pression sur le G5 Sahel pour organiser des offensives aux trois frontières du Mali, du Niger et du Burkina Faso. Taper comme ça, en pleine capitale, à Ouagadougou, ce sont des représailles, une vraie stratégie pour dire : « On vous touche là où vous ne nous attendez pas ».

Il s’agit d’un message envoyé aux autorités burkinabées et françaises quelques semaines après le voyage d’Emmanuel Macron dans la région ?

Oui, et c’est vrai que l’opération française de février s’approchait pour la première fois autant de la frontière algérienne. Au moins une vingtaine de jihadistes proches de Iyad Ag Ghali ont été tués. C’est une sorte de vengeance, dans une capitale qui est un peu le maillon faible de la région. Les troupes françaises sont très mobilisées actuellement au Mali, alors taper à Ouagadougou est quand même un message.

Quel est le lien entre une attaque à la frontière algérienne et une réponse au Burkina Faso ?

Le Burkina Faso est le cœur des forces spéciales françaises de l’opération « Sabre », celles qui sont venues attaquer les jihadistes à la frontière algérienne le 14 février, donc le message est clair. Les frontières n’existent pas. Vous avez toute cette zone sahélo-saharienne et cette opération « Barkhane », qui est quasiment mission impossible avec 4 000 hommes français sur 5 millions de km2. Même les Américains en Afghanistan, avec 650 000 hommes sur un territoire moitié moins grand, n’y sont pas arrivés. Il y une tentative de former des bataillons de ce G5 Sahel, et en plus Macron a demandé des résultats au premier trimestre 2018. Ils peuvent taper où ils veulent dans cette région, à partir du moment où ce sont des attentats terroristes avec des jihadistes aguerris.

Pourquoi le Burkina Faso est-il un maillon faible selon vous ?

Car il y a eu une révolution démocratique. On ne peut que s’en réjouir. Mais avant ce pays était tenu d’une main de fer par Blaise Compaoré qui était militaire, qui contrôlait toutes les relations militaires et sécuritaires sur l’ensemble de la région. C’est évident que depuis, et avec le coup d’État raté de 2015, l’armée a été purgée. Pour former un membre vraiment aguerri des forces spéciales, il faut au moins cinq ans. Donc même si le Burkina Faso reconstitue son armée actuellement, ce n’est pas demain la veille qu’il pourra lutter contre des jihadistes aguerris.

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